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Covid-19 : 10 diplômés de GEM décryptent l'impact de l'épidémie

Success story

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22/04/2020

Grenoble Ecole de Management propose un numéro hors série #GEMAlumni de ses points de vue d'experts sur les évolutions du monde engendrées par l'épidémie du Covid-19 dans différents secteurs d'activités : RH, commerce, industrie, automobile, transformation digital, tourisme et hôtellerie, transition énergétique, agroalimentaire, mutuelle et assurance.


Après vous avoir présenté, dans les 4 premiers numéros de cette chronique les décryptages de nos enseignants chercheurs et des membres de notre staff, nous sommes allés interroger nos diplômés. Dans ce numéro "hors-série", dix d'entre eux vous livrent leurs réflexions sur ce qui se passe dans leur secteur d'activité ou dans leur entreprise.


Ressources Humaines

Par Anne-Caroline Moeller, GEM PGE 1992,
Managing Director – Lee Hetch Harrison

 

Si la situation sanitaire n'était aussi dramatique et ses conséquences encore difficiles à estimer, on pourrait se réjouir de la situation - Avec une plus grande retenue, on constatera une accélération de changements substantiels, durables et positifs dans le management des entreprises parmi lesquels :

  • la généralisation du télétravail (pour les fonctions « bureau »), l’apprentissage de l’organisation requise et la disparition de quelques barrières psychologiques (perception erronée que distance = non contrôle). 
  • une gestion nouvelle des réunions (durée, ponctualité, agenda, distribution de la parole) avec comme bénéfices constatés une proximité humaine attentivement élaborée et une efficacité nouvelle constatée
  • de nouvelles postures de leadership oscillant entre les urgences du temps présent (plan de continuité d’activité et recours aux dispositifs d’ajustement de temps de travail) et le souci permanent de maintenir le cap et faire face à une crise économique incommensurable.

Et demain ces Leaders pourront s’appuyer sur cette agilité pour maintenir un engagement focalisé du capital humain vers le retour à une situation d’équilibre (production/résultats) et pour redonner à leur entreprise toutes les ressources pour rebondir.

 

Commerce et commerce en ligne

Par Guillaume Decitre, GEM PGE 1990
Président de Vilvio et du fonds Decitre

 

Les crises arrivent toujours de là où on ne les attend pas. Alors comment s'y préparer ?

Sorti de GEM en 1990, j’ai vécu trois crises majeures : le 11 septembre en 2001 à Palo Alto avec 2 collègues de bureau qui étaient dans un des deux avions du WTC, la crise des « Subprimes » en 2008 à Lyon à la tête de Decitre avec 400 collaborateurs , et maintenant COVID 19 à Paris avec une startup de 23 personnes et une fondation avec 3 salariés et 60 bénévoles.
Je ne pense pas vraiment que l'on puisse complètement s'y "préparer" car par essence une crise majeure présente un caractère disruptif et dépasse l'entendement.
Cela étant je pense que l'on peut garder en tête 3 principes de conduite qui me guident :

  1. Faire de son mieux. A l'impossible nul n'est tenu, par contre charge à chacun de faire de son mieux, et on peut toujours faire mieux.
  2. Montrer que l'on est présent, à l'écoute et au service de ses équipes. Face à la peine, à la peur, au désarroi, ça réchauffe le cœur, donne du courage et forge une dynamique d'équipe.
  3. "Do the right thing". Prendre les bonnes décisions, et mettre en œuvre les actions qui en découlent. D'expérience ce sont TOUJOURS les décisions les plus difficiles qui sont les bonnes. Elles semblent parfois inconcevables, souvent compliquées et pourtant c'est ce qui permet de passer le cap et de grandir.

Je rajoute une pratique, la méditation, qui permet de se recentrer, de trouver calme et lucidité.
Enfin une crise est une leçon d'humilité.
Soyons reconnaissant envers toutes ces personnes qui travaillent, souvent mal payées et peu reconnues, à notre service: personnel de santé, employés de commerces ou supermarchés, chauffeur routiers, éboueurs, SAMU policiers et pompiers...
Pour reprendre les propos d'Emmanuel Faber, une entreprise doit avoir une utilité sociale. Quelle est la réalité de l'utilité sociale de notre activité, de notre entreprise? Ces quelques jours de confinement sont une opportunité pour les redécouvrir.

 

Industrie

Par Nicolas Series, GEM PGE 1991,
Président de Zeiss France

 

Zeiss opère sur 4 secteurs d’activité et les conditions de la reprise vont être disparates selon les secteurs !
Dans l’optique ophtalmique (les verres de lunettes) le marché est assez résilient. Avec la reprise des consultations d’ophtalmologues il y aura de nouveaux des ordonnances et des clients chez les opticiens.
Dans la microscopie et le médical, deux autres de nos secteurs d’activité nous allons sans doute bénéficier et apporter notre contribution au grand plan sur la Recherche et les hôpitaux annoncés par le président de la république. Les perspectives sont donc bonnes.
En revanche en métrologie, division qui s’adresse à l’industrie à proprement parler, je pense que cela va être très difficile si les investissements sont mis au point mort par nos clients. 

 

 

Automobile

Par Jean-Philippe Imparato, GEM PGE 1988
PEUGEOT Brand CEO & PSA Retail Director – Groupe PSA

 

Chez PSA, nous voyons la phase d’après comme un retour à ce que nous appelons le « new normal », fondé sur une préoccupation environnementale accrue (ce qui signifie pour l’industrie automobile une accélération du switch to électrique), et sur une disruption digitale en matière de distribution, le selling on line prenant enfin toute sa place dans un monde resté longtemps statique en la matière. Bref, un futur qui pour nous sera toujours « unboring » c’est à dire fun mais aussi et plus que jamais safe et responsible !

 

 

 

Transformation digitale... for Society

Par Jean-Luc Vecchio, GEM PGE 1994,
CEO Tessi Consulting & Integration Europe et CEO Tessi Suisse

 

Membre du comité scientifique et stratégique de la chaire GEM "Talents de la transformation digitale"
La résilience actuelle des entreprises tient en partie aux architectures distribuées qui permettent le travail collaboratif à distance ; elles impliquent la distribution de la confiance aussi ; avec moins de supervision directe, chacun se responsabilise tel un auto-intrapreneur.
Moins de frictions (déplacements, réunions, ...) pour des décisions business plus fluides, robustes comme l'intelligence situationnelle des sachants 'du local'.
L'intelligence est mieux sollicitée, alors l’engrenage implacable qui alimente l'envie de 'servir' mène à l'excellence. Pour mieux satisfaire la quête de sens de chacun : ou quand le mot "share", agent viral du digital, dévoile son bénéfice !

 

Tourisme et Hôtellerie

Par Pierre Lagrange, GEM PGE 1991
Groupe Accor – Directeur des opérations de Franchise – Paris IDF

 

CRISE DU COVID-19, CE QU’ON SAIT…C’EST QU’ON NE SAIT PAS
Alors que nous sommes au coeur de la crise, il faudrait déjà en tirer les enseignements et préparer l’avenir. Les interrogations dans notre secteur sont nombreuses :

  • Reprise en 2020, en 2021, plus tard ? en U ou en V ?
  • Appétit renforcé pour le voyage ou repli salutaire ?
  • Télétravail ou bureau ?
  • Retour aux basiques ou envie encore plus forte de sophistication ?
  • « business for purpose » ou retour aux actionnaires ?
  • ….

La seule vérité, c’est que nous ne savons pas. Nous devons faire preuve d’humilité et apprendre en marchant.
En attendant, nous livrons la bataille : chaque jour les équipes Accor ouvrent leurs hôtels à des équipes de soignants et donnent un sens concret à nos valeurs : hospitalité, ouverture sur l’autre et générosité.


 

Transition Energétique

Par Anne Bringault, GEM PGE 1989
Réseau Action Climat - Responsable Transition Energétique

 

La crise sanitaire et le confinement impactent particulièrement les plus modestes, les mal-logés et les plus vulnérables.
La baisse des cours du pétrole risque de retarder les politiques d'économie d'énergie, en particulier, la rénovation des logements. C'est pourtant un enjeu clé à préserver, surtout pour les ménages les plus précaires qui ont des difficultés à se chauffer.
Le secteur des transports est lui aussi particulièrement impacté, à la fois par la baisse d'activité de la période de confinement actuelle, mais aussi par le prix du pétrole. Les soutiens de l'Etat à l'aviation ou à l'automobile ne doivent pourtant pas conduire à un affaiblissement des objectifs climatiques, bien au contraire.
Car il ne s'agit pas de redémarrer comme avant, mais d'apprendre de la crise actuelle pour mieux se prémunir face aux suivantes, notamment la crise climatique.
L'enjeu est de construire des sociétés plus résilientes, plus économes en énergies et en ressources naturelles, et s'appuyant sur des énergies renouvelables décentralisées, davantage à même de résister à des chocs.
La France a tous les atouts pour opérer ce virage, si un cap clair est donné, en lien avec l'Union européenne, permettant de mobiliser tous les acteurs dans cette direction. 

 

Commerce en ligne

Par Loic TANGUY, GEM MSE 2006 - PGE 2005
Président et Fondateur de lesgrappes.com, circuit court de vins de vigneron

 

Ce confinement prolongé aura pour conséquence d’imposer un coup d’arrêt durable à deux piliers de notre société de consommation: les voyages et les grands lieux physique de consommations. Avec cette tendance à la distanciation qui va perdurer, les acteurs du commerce doivent s’adapter pour ajouter une dimension digitale à leur activité à l’instar du boom de la téléconsultation dans la médecine.
Dans le e-commerce les deux tendances fortes seront la réappropriation du digital par les producteurs et par les petits acteurs du commerce traditionnel : 

  • la mise en place de circuit-court pour les producteurs: les consommateurs vont exprimer le besoin de se se tourner vers une consommation qui a du sens avec une meilleure répartition de la valeur et une meilleure visibilité sur ce qu’ils achètent.
  • la digitalisation des petits commerces de proximité: les petits commerçants vont multiplier les initiatives de vente en direct consommateur ou au travers de plateformes comme epicery pour lutter Amazon et les sites e commerce des acteurs de la grande distribution.


Agro-alimentaire

Par Béatrice de Noray, GEM PGE 1996
Groupe BEL France – Directrice Générale

 

Aujourd’hui dans l’agro-alimentaire nous sommes dans une situation où nous devons maintenir la chaine alimentaire et ceci nécessite l’implication de tous.
Pour nous qui sommes dans l’industrie laitière sur le marché du fromage lié, cette chaine démarre chez les éleveurs qui assurent chaque jour la production du lait dans l’ouest de la France. Elle passe ensuite par nos collaborateurs dans nos usines qui travaillent quotidiennement pour assurer la production de nos fromages : depuis le début de la crise et à ce jour, nos usines à Evron, Pacy, Sablé-sur-Sarthe, Dole et Lons continuent de produire. Le maillon suivant est la logistique, et donc nos transporteurs qui assurent l'acheminement ; nous mettons tout en œuvre pour livrer nos clients distributeurs au maximum de nos capacités. En dépit du fait que nos forces de vente ne puissent pas accéder aux magasins et que notre réseau de consommation hors-foyer ne soit plus opérationnel, nous nous sommes engagés en tant qu’entreprise, autant que faire ce peut, à maintenir l’emploi de toutes les équipes. Enfin, nous nous mobilisons aussi pour les populations hospitalières et ceux qui en ont le plus besoin, nous organisons l’acheminement de plus de 253 000 produits auprès de 76 banques alimentaires et de l’APHP, notamment dans l’est de la France.
Ce stade de l’évolution de la situation, le plus important me semble être que, tous ensemble, nous préservions cette chaîne, et qu’en tant qu’entreprise française et familiale, nous assumions notre rôle économique et sociétal.

 

Mutuelles et Assurances

Par Frédéric ROUSSEAU, GEM PGE 2001
La Mutuelle Générale - Directeur Général Adjoint

 

Je travaille dans l’assurance, un secteur d’activité ultra réglementé, avec une longue histoire, des usages anciens, une culture prudente de la gestion du risque, certains détracteurs diront « une industrie un peu vieillissante ». Après 3 semaines de confinement, mon entreprise prouve que nous n’avons pas à rougir face à d’autres industries réputées plus agiles ! Au contraire.
En tant que dirigeant, la crise du COVID-19 nous met en première ligne, en 24h nous avons dû changer notre moteur opérationnel, notre façon de manager et de répondre à nos clients.
Nous avons surtout dû prendre des décisions rapides en analysant leurs impacts au niveau de l’entreprise mais aussi au niveau sociétal. Par exemple, décider le dimanche 15 mars de faire rentrer chez eux tous nos salariés et de maintenir leur salaire sans savoir ce que le gouvernement allait décider le 17 mars, était un choix dicté par la préservation de la santé de nos salariés, notre capital humain.
Même chose sur le recours au chômage partiel, notre énergie s’est focalisée sur la recherche d’activité pour nos équipes en étant innovant sur de nouvelles façons de travailler plutôt que de chercher la simplicité en faisant un dossier auprès du ministère du travail, cette solution devant être l’ultime recours, la Mutuelle Générale maintient toujours son outil opérationnel à 100% à l’heure où j’écris ce texte.

On dit souvent que c’est face à un mur que l’on devient innovant et inventif pour trouver la solution. Je le vis au quotidien en ce moment, au-delà de notre capacité à trouver des solutions, je trouve que nous sommes surtout (re)devenus des décideurs responsables, des acteurs du changement. Nous prenons des décisions de bon sens.
Dans l’entreprise, nous avions mis 18 mois pour aboutir à la mise en place d’un premier accord de télétravail avec pas mal de réticences internes, entre les grèves de décembre et la crise du Covid19 les états d’âmes se sont envolés et nous nous rendons compte que l’entreprise fonctionne avec 99% de ses salariés chez eux. Cela devient normal de faire des Codir, des Comex et des Conseils d’Administration avec TEAMS depuis son salon !!!
Comment prendrons-nous nos décisions futures une fois le retour à la normalité ? Garderons-nous cette capacité à décider rapidement, à travailler autrement, à prendre des risques ? Personnellement je le pense et je le souhaite…

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